Le marché immobilier à Arcachon vient de battre un record : selon l’INSEE, le prix médian du mètre carré a franchi la barre des 8 650 € au 1ᵉʳ trimestre 2024, soit +7,8 % en un an. À titre de comparaison, Bordeaux progresse “seulement” de 3,1 %. Preuve que le bassin garde le vent en poupe malgré la remontée des taux. Faut-il y voir un pic ou, au contraire, une rampe de lancement pour de nouvelles opportunités ? Décryptage, chiffres clés et pistes d’investissement, pour décider sans se laisser griser par le chant des mouettes.
Panorama 2024 : des fondamentaux toujours solides
Arcachon, cité balnéaire fondée en 1857 sous l’impulsion des frères Pereire, demeure portée par trois moteurs incontournables : la rareté foncière (90 % de la commune est déjà urbanisée), une attractivité touristique pérenne (2,3 millions de nuitées en 2023, Office de tourisme) et un bassin d’emplois tertiaires en croissance (+4,2 % de créations nettes).
Les données récentes confirment l’effet “refuge” de la pierre arcachonnaise :
- Taux de vacance : 1,9 % contre 8,5 % en moyenne nationale.
- Loyers moyens (appartement 2 pièces, quartier Ville d’Hiver) : 990 €/mois, +5,4 % sur douze mois.
- Temps de mise en vente : 47 jours en 2024, contre 63 jours en 2022 (baromètre Notaires de France).
D’un côté, la flambée des coûts de construction post-Covid renchérit les programmes neufs ; mais de l’autre, la demande locative saisonnière offre une rentabilité brute de 4 % à 6 %, supérieure à Paris intra-muros (≈3 %). La tension demeure palpable.
Ville d’Hiver, Abatilles, Aiguillon : trois micro-marchés, trois dynamiques
- Ville d’Hiver : Pignons Belle Époque et vue bassin. Prix moyen : 10 400 €/m². Les résidences secondaires représentent 62 % des transactions.
- Les Abatilles-Péreire : quartier “family friendly”. 8 050 €/m² mais une offre de maisons avec jardin, rares en centre-ville.
- L’Aiguillon : ancien port de pêche en reconversion. Encore à 6 200 €/m². La mairie d’Arcachon prévoit 180 logements neufs d’ici fin 2025, ciblant la classe moyenne locale.
Pourquoi les taux hauts ne refroidissent-ils pas les acheteurs ?
La Banque de France estime le taux moyen des crédits à 4,05 % sur 20 ans (mars 2024). Pourtant, le volume de ventes n’a baissé que de 3 % à Arcachon, contre ‑14 % en Gironde. Trois raisons principales :
- Apport conséquent : 38 % des acheteurs règlent comptant (profil seniors ou cadres parisiens).
- Effet résiduel de l’épargne Covid : 142 milliards € de surplus d’épargne accumulés en France (source : Banque de France).
- Rente touristique : le meublé de tourisme compense la mensualité dans 48 % des projets étudiés par la Caisse d’Épargne Aquitaine Poitou-Charentes.
Ce cocktail réduit l’élasticité au coût du crédit.
Comment optimiser un investissement locatif sur le bassin ?
Qu’est-ce que le dispositif Loc’Avantages et pourquoi l’utiliser ?
Le programme Loc’Avantages (ex “Louer Abordable”), prolongé jusqu’en 2026, permet de déduire jusqu’à 65 % de ses revenus fonciers si l’on loue 6 ans à un loyer inférieur de 45 % au marché. Dans la zone B1 d’Arcachon, le plafond 2024 s’établit à 12,95 €/m². Pour un T2 de 40 m² à l’Aiguillon, cela représente 518 € de loyer mensuel (contre 780 € de marché).
Avantage : vacance quasi nulle et fiscalité allégée. Inconvénient : cash-flow limité.
Scénario chiffré
- Prix d’acquisition : 248 000 € (studio Ville d’Été, 30 m²).
- Loyer saisonnier moyen : 620 €/semaine en haute saison, 390 €/semaine le reste de l’année (AirDNA, 2023).
- Occupation : 70 % annuel.
→ Rentabilité brute : 5,8 % avant charges.
En meublé non professionnel (LMNP au réel), l’amortissement permet de neutraliser l’impôt pendant 8 ans en moyenne.
Tendances 2025 : quels signaux surveiller ?
Mutations d’usage
Les discussions parlementaires sur la taxe sur les résidences secondaires (projet de loi de finances 2025, porté par Bruno Le Maire) pourraient alourdir de 60 % la part contribution foncière. Un facteur à intégrer pour les investisseurs saisonniers.
Mobilités douces et attractivité
La mise en service d’un RER métropolitain Bordeaux–Arcachon est annoncée pour décembre 2026. Temps de trajet prévu : 32 minutes. Historiquement, chaque nouvelle liaison rapide s’accompagne d’un sursaut des valeurs “à pied de gare” ; l’exemple de la LGV Tours-Bordeaux (+12 % dans l’année suivant l’ouverture) en atteste.
Pression écologique
Entre 2024 et 2034, la Côte Atlantique pourrait perdre 50 m d’estran en certains points (rapport Cerema). À Arcachon-même, la zone la plus exposée reste le front de mer Pereire. Les assurances commencent à moduler les surprimes submersion. Prévoir une réserve de 0,15 % du loyer annuel pour anticiper la hausse de prime.
Faut-il encore acheter à Arcachon ? Points forts et limites
-
Atouts
- Marché résilient, corrélé au tourisme haut de gamme.
- Offre locative tendue, donc faibles vacances.
- Perspectives d’infrastructures (RER métropolitain).
-
Freins
- Prix d’entrée élevé, ticket moyen 550 000 € (tous biens).
- Fiscalité locale en hausse : +8,7 % de taxe foncière en 2023.
- Risque climatique sous-estimé par certains quartiers.
D’un côté, la pierre arcachonnaise protège contre l’inflation (référence : crise des années 70, où la ville n’a jamais connu de baisse nominale). Mais de l’autre, la rentabilité nette, après impôts et charges, peine parfois à dépasser 3,5 % pour les biens premium. À l’investisseur de hiérarchiser sécurité patrimoniale et rendement.
Où se cache la prochaine opportunité ?
Un œil averti repèrera les îlots “post-industriels” de l’Aiguillon. Les anciens ateliers ostréicoles reconvertis en lofts pourraient bénéficier de la future coulée verte littorale, projet validé par la Communauté d’Agglomération du Bassin d’Arcachon Sud (COBAS). Les permis déjà déposés laissent entrevoir un potentiel de plus-value à deux chiffres pour qui se positionne tôt, à l’instar de la reconversion des chantiers navals de La Ciotat au début des années 2000.
Arcachon demeure une partition subtile, entre nostalgie Belle Époque et appétit contemporain. En tant qu’analyste aguerrie, je ne conseille jamais d’acheter “par défaut”. Mais si vous associez horizon long terme, sélection rigoureuse du micro-quartier et maîtrise du cadre fiscal, le bassin continue de chanter juste. À vous désormais de sonder le terrain, de visiter, de comparer ; bref, de mettre le pied à l’étrier avant que la prochaine marée, immobilière ou océanique, ne redistribue les cartes.